« Il ne vous fera rien »

Je sais qu’en écrivant cet article, il y a de grandes chances que je me prenne un sacré retour de manivelle (expression qui n’est plus utilisée que par 1,3% de la population francophone). Je sais qu’un long débat va s’éterniser et que tout le monde va vouloir tenter d’imposer une pensée unique, c’est TRÈS tendance en ce moment. Mais je vais quand même me jeter à l’eau (2,7%) quitte à passer pour un fameux lascar (0,1%).

Depuis un peu moins d’un an, je me suis remis à la course à pied (23,6%; maintenant on dit footing, cross ou running) et au vélo. J’ai la chance de vivre à 3 minutes (avec EPO, 10 sans) d’une entrée dans la somptueuse forêt de Soignes. Y a des dizaines de kilomètres géniaux pour les piétons, les vélos et les chevaux. Et aussi pour les chiens. Les quoi ? Depuis que ce saligaud de « Coquin », le (très) vilain cocker de mon papy m’a bouffé la moitié de mon majeur quand j’avais à peine l’âge de comprendre à quoi servait des doigts. Je n’ai jamais digéré cette petite attaque de sale fourbe. C’était tellement trop facile pour lui. Un ket de 6 ans qui va gentiment sentir la douceur de son poil soyeux. Et au lieu de me remercier, cette petite crapule prend mon doigt pour une croquette. En sachant très bien que je ne pouvais rien faire pour me venger, si ce n’est lui défoncer les tympans avec des hurlements stridents alternants entre puissance et longue sonorité aiguë. Je savais déjà très bien exagérer à l’époque. Donc, c’est vrai, je le reconnais, je ne suis pas un grand fan des chiens. Je ne dis rien d’autre.

Si vous êtes toujours en train de lire mon article et que vous n’avez pas encore appelé Brigitte ou Laurent, alors vous avez sans doute compris. Vous avez sans doute deviné la suite de l’article.  Alors, oui le million et demi de chiens qui vit en Belgique a le droit de se balader en forêt de Soignes. Oui, il a le droit de renifler des trucs moches. Oui, il a le droit de mettre une petite veste si il fait un peu frisquet (4,8%). Oui, il peut aboyer. Oui, il est « si beau quand il court ». Oui, durant toute son histoire, il a revendiqué sa liberté (même si il n’a pas toujours été compris à sa juste valeur). Le problème, c’est que sa liberté passe par des prises de décisions parfois un peu spéciales (avec ou sans EPO). Parfois, il se sent tellement libre Max (y en a quand même beaucoup qui s’appellent Max), qu’il décide d’agrémenter sa promenade par un petit passage dans les rayons d’une roue de vélo lancée à vive allure (34%). C’est pas toujours ce qu’il y a de plus chouette comme liberté, on en convient. Y en a d’autres, qui s’appellent parfois Max aussi d’ailleurs, qui préfèrent largement suivre le joggeur qu’il na jamais vu. Le principe est assez simple : il l’accompagne de manière très synchronisée dans sa foulée. La liberté ! La seule, la vraie. Sauf qu’à un moment donné, la synchronisation devient accessoire… Et Max a besoin de montrer qu’il va plus vite. Mais uniquement en passant entre les jambes du joggeur, c’est beaucoup mieux.

Juste avant cet épisode rempli de liberté, les propriétaires de Max auront rassuré le cycliste et le joggeur. « Il ne vous fera rien ». « Il est gentil ». C’est vrai, très gentil ! Max offre des cadeaux. Des plâtres (on peut choisir la couleur). Des commotions. Des nez cassés. Une pointe à 215 en pulsations cardiaques à la minute (parce que même si l’accident est évité, il ne vous a pas « rien fait », il a occasionné un stress, un dimanche matin). Et puis, « Je suis désolé, ça n’était jamais arrivé avant ». « Il a sans doute été énervé par la vitesse ».

Comme je n’ai jamais vraiment été intéressé par la possibilité d’être accompagné d’un chien dans ma vie, je me suis dit que s’ils couraient sans laisse dans des zones qui l’obligent pourtant, c’était à cause du prix. Ca doit coûter horriblement cher une laisse de chiens.

Le pire dans tout ça, c’est que je comprends tellement bien. Sincèrement. C’est tellement plus sympa de laisser son chien se balader sans devoir être tout le temps en contact avec cette laisse hors de prix. Il a le droit d’être libre Max. Si Coquin ne m’avait jamais bouffé mon majeur, je serais peut-être aussi l’heureux propriétaire de Max. Je pense que je lui aurais aussi proposé de prendre sa liberté un dimanche matin, dans une forêt, sans faire attention à ceci : la carte des endroits où le chien doit être attaché.

Et comme je sais que je n’arriverai pas à convaincre tout le monde (c’est quoi ce mec qui se permet de faire la leçon alors que les gens en VTT roulent comme des malades), je me suis dit que j’allais apporter quelques arguments qui arriveront peut-être à vous convaincre.  Ils sont signés Docteur Julien Binard 🙂

« Si Adrien a un peu de mal avec les chiens (aaah les traumatismes de l’enfance…), je suis évidemment totalement à l’opposé et je fais partie de ceux qui s’extasient devant un chien qui court en liberté. 

 Malheureusement, aucun chien (Max ou Coquin) n’est totalement prévisible. Même le votre. Même si vous le connaissez par coeur, qu’il a toute votre confiance et que c’est le plus gentil au monde.

La rencontre avec un autre chien, les odeurs, les bruits, les autres animaux, … toutes les stimulations possibles et imaginables peuvent provoquer une réaction inattendue de votre animal ou de celui qu’il rencontre.

Si vous saviez le nombre de consultations pour morsures entre chiens nous rencontrons suite à des comportements qui peuvent tout à fait être évités.

 Le danger existe donc non seulement pour les promeneurs, les cyclistes, les cavaliers, les autres chiens en balade, mais aussi pour le chien lui-même.

Guidé par son instinct, il peut s’éloigner, se perdre, traverser des routes et prendre des risques lorsque vous ne l’avez plus sous contrôle.

Gardons bien en tête que les dégâts occasionnés par le chien (blessures ou matériels) sont sous la responsabilité du maître, même si le chien s’est échappé.

 Le chien est un animal dont les aptitudes sont incroyables mais en échange d’un peu de travail. Marcher au pied, s’arrêter puis revenir lorsqu’on l’appelle, changer de côté lorsque vous croisez quelqu’un… Tout cela est possible, alors pourquoi ne pas s’y mettre dès aujourd’hui ? Après quelques mois d’exercice, vous (et votre copain à 4 pattes) vous sentirez plus sereins en balade.

 Si vous souhaitez laisser votre chien se défouler en liberté (et ils en ont bien besoin!), veillez à le faire dans des endroits autorisés, sécurisés et qu’il a pu découvrir à vos côtés auparavant.  

Simple question de savoir vivre finalement. Adrien finira bien par se mettre au Cani-cross, un jour, et laisser rouiller son VTT (83%?)…  » 

 Pour suivre les activités du vétérinaire Julien Binardc’est ici  ou ici

On se voit dans le bois dimanche ? Max vient aussi ?

 

 

Adrien Devyver
Adrien Devyver